
La théorie du voyage à travers un trou de ver :
Très hypothétique, la théorie des voyages à travers des trous de ver est un exemple également phare après le moteur à antimatière. On retrouve cette théorie dans de nombreux films récents mais également dans de plus anciens. Notre exemple, ici, sera Interstellar, film emblématique de la science-fiction.

Représentation du trou noir dans Interstellar

Représentation du trou de ver dans Interstellar
Aujourd'hui, voyager à travers des trous de ver semble relever du projet très ambitieux. Ce mode de voyage consisterait à plier l’espace-temps en deux pour rapprocher deux points de l’univers A et B et ainsi parcourir de très grandes distances en un temps réduit.

Représentation du système de voyage par trou de ver avec le pliage de l'espace temps entre deux points : la Terre (point de départ) et Alpha du centaure (point d'arrivé)
À l'heure actuelle, il existe différents types de trou de ver. Tous sont des solutions mathématiques plutôt que des objets réalistes :
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le trou de ver de Schwarzschild qui est infranchissable,
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le trou de ver de Reissner-Nordstrøm ou Kerr-Newman qui est franchissable mais dans une seule direction, pouvant contenir un trou de ver de Schwarzschild en sortie,
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le trou de ver de Lorentz à masse négative qui est franchissable dans les deux directions.
Ces différents types de trou de ver peuvent ensuite être séparés en deux familles. D'un côté, on a les trous de ver à symétrie sphérique qui ne sont pas en rotation comme ceux de Schwarzschild et de Reissner-Nordstrøm. De l'autre, on a ceux en rotation comme celui de Kerr-Newman.
Si on essaye de fabriquer un trou de ver à partir de matière à masse positive, il explosera en éclats. Si une matière à masse négative existe (ou matière exotique), on peut, en théorie et selon certains principes, élaborer un trou de ver statique en accumulant des masses négatives.
La théorie élaborée par Einstein précise qu'il est possible de fabriquer n'importe quel type de géométrie spatio-temporelle, statique ou dynamique (en mouvement). Cependant, une fois la géométrie définie, ce sont les équations d'Einstein qui prennent le relai et permettent de dire quel devra être le tenseur d'énergie-impulsion de la matière pour obtenir ainsi cette géométrie. En général, les solutions de trous de ver statiques requièrent une masse qui est négative.
Dans tous les cas, la matière qui y est soumise à une densité extrême et qui est réduite à l’échelle de Planck, il n’y a plus qu’un pas infinitésimal à franchir afin de soumettre cet environnement aux fluctuations d'énergie de la théorie de la gravitation quantique. Certains chercheurs soutiennent ainsi que les singularités peuvent déboucher sur des trous blancs, également appelé fontaines blanches où jaillirait la matière rendue à sa liberté. Malheureusement, un trou blanc viole le second principe de la thermodynamique qui veut que dans un système fermé ou dissipatif, l'entropie ne peut pas décroître.
Sur un plan structurel, un trou de ver obéit à une géométrie correspondant à celle de Schwarzschild ou bien celle de Kerr. Il consiste en une singularité (un trou noir) opposée à un trou blanc entre lesquels se trouve un trou de ver qui relie les horizons de deux univers.
En 1935, Einstein et Rosen découvraient qu'en excluant les singularités du champ et en modifiant légèrement les équations de la gravitation, ils obtenaient des solutions simples dans le cas d'une symétrie sphérique chargée et statique. C'était certes des représentations mathématiques, mais elles représentaient un espace physique constitué de deux feuilles identiques reliées entre elles par une particule représentée par un pont...
Un pont d’Einstein-Rosen, communément appelé trou de ver, est un pont reliant un trou noir et un trou blanc. Concrètement, rien ne peut sortir d’un trou noir, pas même la lumière, alors que rien ne peut entrer dans un trou blanc (la lumière en sort); le trou de ver est un pont se formant entre les deux (d’où son nom).
Ces trous de vers, dits de Lorentz, requièrent de la matière exotique afin de leur permettre de rester ouverts car elle demande moins d'énergie que le vide quantique qui, lui, subit des fluctuations d'amplitude assez variables. Il peut s'agir d'énergie négative par exemple, comme de l'antimatière qui maintiendrait l'ouverture du trou de ver loin de l'horizon. L'ouverture, elle-même, doit présenter une pression de surface positive afin de la maintenir ouverte durant les transferts et éviter qu'elle ne s'effondre, ce qui pourrait être assez facheux. Seul problème, personne ne sait comment stocker autant d'antimatière (de l'ordre de millions de tonnes) et suffisamment longtemps au même endroit pour entretenir ce tunnel dans l'espace-temps
Mais en théorie, si on arrivait à stabiliser un trou de ver, il serait donc possible de voyager à travers et donc de parcourir de très grandes distances dans une échelle de temps qui reste acceptable pour l’homme.
Le modèle du voyage par trou de ver reste donc de l'ordre de l'hypothétique mais il ne faut pas le laisser de côté en pensant que cela ne pourra jamais fonctionner. Au contraire, il faut persévérer et trouver des solutions. Cette technologie représente peut-être l'avenir de l'homme.


À gauche, une photographie d'Albert Einstein. Au milieu, une représentation en 2D d'un pont d'Einstein-Rosen connectant deux univers parallèles. À droite, une photographie de Nathan Rosen. © DR
Jean-Pierre Luminet parlant des trous de ver, de leur connexion avec les trous noirs en rotation et du voyage interstellaire.
© Jean-Pierre Luminet, YouTube